L'impact de l'intelligence artificielle sur l'économie sera considérable. Pour bien s'en rendre compte, il suffit de passer en revue quelques-unes des conséquences à en attendre sur quelques secteurs vitaux de l'économie. Commençons donc par les magasins.
Amazon Go a ouvert ses portes en février à Seattle. C'est un magasin sans caisses où les consommateurs s'identifient avec leur smartphone en entrant, puis se servent librement et reçoivent leur ticket de caisse sur leur téléphone en sortant. Dans cet espace, toutes vos actions sont repérées puis analysées par des logiciels d'intelligence artificielle tout au long de votre parcours. Rien à faire, juste choisir, prendre et s'en aller.
Du point de vue informatique, ce que fait Amazon dans ce magasin est tout de même une prouesse technologique. Non seulement il faut relier les caméras, les capteurs à des logiciels de reconnaissance de formes, mais également analyser le comportement de la personne qui a pris puis déposé un produit dans son panier ou à l'inverse qui hésite à le prendre, le repose (pas toujours où elle l'a pris), puis en reprend un autre. Bref, il faut que le système soit très sûr pour interpréter sans erreurs des comportements nombreux et parfois équivoques.
L'IA a aujourd'hui cette faculté d'apprendre. Et Amazon a ouvert pendant un an ce magasin de Seattle uniquement pour ses propres employés, jusqu'au jour où enfin les algorithmes ont su traiter n'importe quel client et où le système a su démontrer qu'il était en mesure de performer mieux qu'avec des caissières: plus vite, sans erreurs, et... sans voleurs! Ce long apprentissage, à l'instar de celui des voitures à conduite autonome, n'a certainement pas été sans revers; mais le succès est là.
C'est cela l'IA aujourd hui; des algorithmes qui ont besoin d'être supervisés assez longtemps pour supprimer lis sinon mieux, que les humains!
L'avenir est donc au commerce automatisé et sans caissières. C'est un changement brutal car pour la Suisse par exemple, on compte plus de 60'000 emplois qui sont ainsi directement ou indirectement menacés.
Déjà aujourd'hui, des caisses automatiques à la disposition des clients sont mises en place dans certains espaces marchands: les clients «scannent» eux-mêmes les codes-barres des produits qu'ils ont achetés et paient directement sur le terminal du point de vente. Ce sont eux qui font le travail de la caissière. Mais il semble bien que demain, nous irons vers une automatisation complète par la mise en œuvre simultanée de la reconnaissance visuelle et des capteurs: donc sans avoir besoin de recourir ni au scannage des produits ni à une theatralisation de la transaction financière qui sera gérée, invisible mais bien réelle, dans le flux.
On peut s'attendre, tout comme chez Amazon Go aujourd'hui, à ce qu'un certain nombre des emplois de caissière soient transformés en emplois d'assistants de vente et de conseil auprès de la clientèle. Pour autant, ce changement de métier ne concernera qu'un certain nombre des personnes employées. Peut-on douter que la révolution numérique entraînée par l'usage massif de l'IA portera des gains en productivité importants qui passeront évidemment par la suppression de postes de travail ?
Mais le changement de nos magasins ne s'arrêtera pas là.
Dès lors que les magasins deviennent des systèmes intelligents capables d'évoluer en fonction de nos habitudes et de nos envies, on peut très bien imaginer que les produits se présenteront à nous selon nos souhaits du moment.
Le magasin sera en réalité augmenté: un environnement à la fois virtuel (hologrammes) et réel, qui va créer de nouvelles expériences client à l'intersection du shopping physique et du shopping virtuel. Saura-t-on encore si l'on navigue sur la «toile» ou si l'on est pris dans le filet classique de la consommation ?
Au centre de ce processus: nos données intelligentes. Celles-ci alimenteront des calculs algorithmiques qui créeront de nouvelles expériences de consommation.
2. LES ASSISTANTS PERSONNELS
Au CES 2018 (Consumer Electronics Show), le plus grand salon mondial de l'innovation technologique grand public de Las Vegas, tous les observateurs ont relaté que le combat des géants, notamment des GAFA, mais aussi de leurs challengers asiatiques, s'est porté sur les assistants personnels. De la voiture à la maison, du bureau à la salle de gym en passant par Internet, il n'y en avait que pour eux. Les « assistants personnels» sont, dirait-on, appelés à devenir les interfaces privilégiées voire exclusives entre nous et les objets qui nous entourent. Chercher, s'infor-mer, comparer, trier, choisir, commander, acheter, payer, etc., ces assistants savent tout exécuter ou presque pou faire de nous des clients-rois. Rêve ou cauchemar ? Il de vient important de comprendre de quoi il retourne !
Extrait du livre collectif IA : Entreprise Augmentée, 2018 par Lev Kiwi, Assia Garbinato, Dominique Genoud, Giorgio Pauletto & Grégoire Ramuz pour le Manufacture Thinking