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Promptons le futur

Par Gilles Robert & Philippe Grize


Extrait du livre "Promtp Futur", disponible aux éditions Georg


Il y a quelques années, quand le tissu industriel de l’Arc jurassien et de la Suisse a été touché par la vague de la quatrième révolution industrielle, celle des systèmes cyberphysiques, de l’IoT, des données et de leurs analyses, on a vu apparaître les promesses de la capacité de la puissance de calcul à notre disposition pour nous aider à com-prendre un monde devenu complexe et caractérisé par des acronymes comme VUCA pour Volatility, Uncertainty, Complexity and Ambiguity. On s’est alors tous interrogés sur la pertinence de ces promesses, on s’est renseignés, et on a appréhendé ce qui se cachait derrière un autre acronyme : IA.


On a ainsi essayé de comprendre ce que ces deux mots antagonistes, pour tout humain qui se respecte, pouvaient bien dire quand on les collait l’un à l’autre. Cela nous a rassurés quand des data scientists nous ont expliqué les principes du machine learning, on comprenait à demi-mot qu’il s’agissait d’algorithmes, d’apprentissage par des données, d’aide potentielle à la décision et que finalement les promesses du digital appliquées à nos problématiques manufacturières et écono-miques pouvaient être pertinentes.


Alors, on s’est mis à expérimenter, individuelle-ment ou collectivement, appliquer les concepts, les principes et les recommandations, étudier jusqu’où on pouvait automatiser certaines tâches, on a vu des « cobots » débarquer sur des lignes de production, on a collecté des données pour voir si la maintenance des machines pouvait devenir prédictive, on s’est plantés devant l’immensité de la tâche, nous rendant compte au passage de la quantité phénoménale de données que l’on générait et qu’il y en avait une majorité d’inexploitables. On a donc appris à les sélectionner et à les structurer pour les exploiter au mieux et en tirer profit en cherchant où pouvait être la valeur ajoutée pour nous et pour nos clients. On s’est alors penché sur l’économie d’usage et la servitisation en se posant pas mal de questions sur l’avenir des emplois, surtout pour celles et ceux qui n’ont pas pris le virage du numérique avec l’apparition des smartphones qui ont envahi nos poches depuis la fin des années 2000.


Mais, tout comme nous nous sommes pour la plupart emparés des capacités de ce vecteur du numérique qui est devenu indispensable à nos vies d’aujourd’hui, nous allons le faire avec l’IA qui est désormais dans les mains du grand public à travers ChatGPT qui vient de faire son apparition avec fracas. Une nouvelle révolution… encore… Il va désormais falloir apprendre à « prompter » pour dialoguer avec nos nouveaux amis, ces modèles générateurs de texte qui rendent concrète cette IA que l’on avait tant de mal à appréhender… Elle nous répond désormais, nous voilà en capacité de dialoguer. Et d’imaginer appliquer cette capacité de dia-logue dans nos vies professionnelles, quel que soit le secteur d’activité, basée sur nos propres données, celles que l’on s’est donné de la peine à structurer.


Une récente étude du MIT et de Stanford (1) concernant l’impact de l’IA sur la productivité des travailleurs, axée sur les capacités révolutionnaires de ChatGPT, révèle le potentiel de transformation des modèles générateurs de texte et des gains d’efficacité significatifs, par une meilleure qualité d’écriture, une réduction des inégalités et une plus grande satisfaction au travail résultant de l’intégration d’outils d’IA plus accessibles à tout un chacun. Oui, nous allons indéniablement nous emparer de ces capacités et nous sommes déjà en train d’imaginer ce que ChatGPT pourrait améliorer, appliqué au milieu de l’industrie pour qui l’IA est un véritable couteau suisse :


Services à la clientèle

Les entreprises peuvent utiliser des modèles générateurs de texte pour créer des chatbots capables de répondre aux questions des clients en temps réel. Les chatbots peuvent être programmés pour comprendre le langage naturel et fournir des réponses précises et utiles, ce qui peut aider à améliorer l’expérience client et à réduire les coûts liés aux services à la clientèle.


Production de contenu

Les modèles générateurs de texte peuvent également être utilisés pour produire du contenu de manière rapide et efficace. Par exemple, les entreprises peuvent utiliser des modèles pour créer des descriptions de produits, des articles de blog, des e-mails de marketing et d’autres types de contenu. Cela peut aider à réduire les coûts de production de contenu et à augmenter la productivité.


Automatisation des processus métier

Ces mêmes algorithmes peuvent être utilisés pour automatiser certains processus métier tels que la rédaction de contrats, la rédaction de rapports et la génération de propositions commerciales. Cela peut aider à réduire les coûts opérationnels et à améliorer l’efficacité de l’entreprise.


Analyses de texte

Les modèles générateurs de texte peuvent également être utilisés pour analyser de grandes quantités de données textuelles, telles que les commentaires des clients, les avis en ligne et les réseaux sociaux. Les entreprises peuvent utiliser ces analyses pour comprendre les tendances du marché, les préférences et les sentiments des clients à l’égard de leurs produits et services.


Certes nous en sommes aux balbutiements de ces modèles de générateurs de texte qui peuvent produire des résultats qui ne sont pas toujours précis ou appropriés, il est donc essentiel que des intelligences non artificielles supervisent et vérifient les résultats produits… Mais n’oublions pas les nombreuses applications fiables du machine learning qui ont récemment et rapidement fait leurs preuves dans de nombreux domaines :


La reconnaissance d’images

Les algorithmes de machine learning sont largement utilisés pour identifier des objets, des personnes ou des caractéristiques dans des images. Cela a permis le développement de nombreuses applications dans des secteurs tels que la sécurité, l’automobile et la médecine.


La recommandation de produits

Ces algorithmes sont utilisés par des sites de commerce en ligne pour recommander des produits à leurs clients en fonction de leurs préférences et de leur historique d’achats.


L’optimisation des itinéraires

L’optimisation d’itinéraires est un problème classique que les algorithmes de machine learning aident à résoudre pour les parcours de livraison en fonction des conditions

de circulation, des horaires et des pré-férences des clients. Cela peut réduire considérablement les temps de transit, les coûts de transport et les émissions de gaz à effet de serre.


La détection des anomalies

Les algorithmes de machine learning sont utilisés fréquemment pour détecter les anomalies dans les chaînes de production avec par exemple l’analyse d’image

pour détecter les défauts et, dans les chaînes d’approvisionnement, pour dépister les retards de livraison ou les erreurs de commande.


La reconnaissance des émotions

L’identification des émotions des clients à partir de leurs expressions faciales,

de leur ton de voix ou de leur langage corporel, est de plus en plus employée dans les centres d’appels ou les commerces, ce qui peut aider les entreprises à mieux comprendre leurs clients et à leur offrir un service personnalisé.


En somme, l’IA aide déjà actuellement à optimiser de nombreux processus et permet une meilleure prise de décision et une meilleure collaboration entre les partenaires impliqués dans l’ensemble des chaînes de production et d’approvisionnement.

Et l’IA ne s’arrête pas là, elle complète aussi les modèles prédictifs classiques :


La prédiction de la demande

On se sert de tels algorithmes pour prédire la demande de produits ou de services,

en utilisant des données historiques, des tendances et des facteurs externes tels que les conditions météorologiques. Cela aide les entreprises à planifier leur production, à ajuster leur stock et à éviter les ruptures ;


La maintenance prédictive

La prédiction des pannes des machines et la planification de la maintenance préventive sont automatisées, ce qui réduit les coûts et l’immobilisation des équipements.


Nous voilà au Graal de la prédiction et de l’anticipation basées sur des données, des statistiques et des probabilités. L’usine est désormais commandée par les statistiques qui sont devenues prépondérantes dans les décisions qui sont prises quotidiennement à l’échelle de la planète. Notre époque voit ainsi naître « l’usine statistique », un système automatisé où les données sont collectées en continu aux différentes étapes et traitées en temps réel pour optimiser les opérations, identifier les tendances, surveiller les performances, détecter les problèmes de qualité, ajuster les paramètres et minimiser les gaspillages.


Et dans leur évolution logique, les IA génératrices nous parleront bientôt avec nos mots et pallieront nos perceptions tronquées en rendant robustes et accessibles les modèles statistiques, qui, grâce à nos compétences, à notre sens des relations humaines et à notre intuition, nous permettront d’accéder à une compréhension encore plus fine de nos usines. Et à nous de les rendre plus performantes, plus en phase avec les ressources à disposition et plus harmonieuses.


Alors, pour anticiper les impacts des révolutions déjà en marche et de celles à venir, et pour ne pas provoquer de rupture sociétale dans un monde du travail secoué par ces innovations technologiques dont l’appropriation s’accélère, et pour décider de notre avenir commun, osons utiliser l’IA pour nous intéresser au futur et le prédire collectivement en confrontant toutes les intelligences disponibles.


1. Brynjolfsson, Erik and Li, Danielle et Raymond, Lindsey R, « Generative AI at Work », National Bureau of Economic Research, Working Paper number 31161, Avril 2023,

www.nber.org/papers/w31161, consulté le 02.08.2023.

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