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L’illectronisme de nos dirigeants est gravissime!

Les responsables veulent avant tout prolonger l’ancien monde. Par Xavier Comtesse & Pascal Eichenberger



En Suisse, nos dirigeants politiques et dans les entreprises ont raté le numérique. Ils n’ont pas saisi l’essence même du digital qui par la réécriture de l’ensemble des processus va transformer ces derniers. Le monde digital n’est pas une copie du monde précédent, il en est un dépassement.


C’est cette dimension qui semble avoir échappé à bon nombre de dirigeants, ils veulent avant tout prolonger l’ancien monde. Les exemples sont nombreux: prenons l’industrie de la machine-outil qui s’est vue imposer les normes CNC par les Japonais (années 1960/1970), de la bureautique de Microsoft (1980/1990), d’internet (1990/2000), de la téléphonie mobile d’Apple et Samsung (2000/2010), des réseaux téléphoniques du chinois Huawei (2010/2020), et aujourd’hui l’intelligence artificielle (IA) des Californiens d’OpenAI. Tout a été imposé de l’extérieur avec retard.


Pire encore quand il s’agissait de transformer nos propres institutions publiques. Alors là de nombreuses difficultés sont apparues. On pourrait même parler «de cafouillage helvétique»: e-administration, dossier électronique du patient, identité numérique, e-votation, etc. Cela a été laborieux et le processus est toujours inachevé.


Ce constat est valable pour toute la population aussi: le Baromètre numérique 2024 de la Mobilière qui vient d’être publié, il y a 15 jours, le confirme: une personne sur trois en Suisse (31%) n’a pas de compétences numériques de base! Cela veut dire qu’un tiers de la population est digitalement illettré, tel est le diagnostic pour la Suisse. Gravissime!

Si vous ne saisissez pas l’ampleur du changement alors vous ne pouvez pas agir dessus

Même si les dirigeants sont mieux formés, il est clair que le sommet de la pyramide a failli. Ils n’ont pas su donner les impulsions nécessaires à la transformation numérique. Mais si vous les interrogez (voir l’étude de la Mobilière), ils n’ont pas l’impression d’avoir raté le virage du digital. Cette divergence entre «ressenti» et «réalité» explique en partie leur échec: si vous ne saisissez pas l’ampleur du changement alors vous ne pouvez pas agir dessus. Cette question de la divergence est intéressante, car elle n’est pas théorique et ne peut donc pas être corrigée par un enseignement, elle doit être vécue en immersion, à l’instar de l’apprentissage d’une langue étrangère dans le pays d’origine de la langue elle-même.


Donc le mal est profond. On le remarque partout dans plusieurs échelons de l’entreprise, notamment dans les conseils d’administration où des personnalités vieillissantes et totalement «illettrées» numériquement parlant continuent de manager, à l’ancienne, l’avenir des entreprises. Une conséquence visible: le manque d’investissements dans le digital. Cela a ralenti considérablement la transformation des entreprises. On le verra maintenant avec l’IA?


Une leçon du passé serait: les administrateurs qui n’ont pas été en immersion IA ne peuvent en aucun cas saisir la profondeur de la transformation sociale actuelle. Ils devraient donc être remerciés.


Article publié dans l'AGEFI, par Xavier Comtesse & Pascal Eichenberger

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